La plus grande ville-fantôme du monde

Il y a quelques jours, notre ami Ronron la Douceur nous a envoyé de ses nouvelles. Ronron est Québécois. Non, ce n’est pas son vrai nom. Ce n’est pas parce qu’il est natif de la Belle Province qu’il peut s’appeler vraiment Ronron. Certes, La Douceur, c’était possible, mais Ronron, non. Il s’agit de son pseudo sur le net, et il lui va parfaitement parce que cet homme est un vrai ange. Sa compagne Lison, aussi. D’ailleurs, nous les appelons les anges de Gatineau, du nom de la ville où ils vivent. Ils passent de temps en temps sur le blog, vous les avez peut-être remarqués.

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Cela ne vous aura pas échappé, nos cousins d’outre-Atlantique ont souvent des patronymes qui fleurent bon le 17e siècle et peuvent parfois ne pas parler tout-à-fait comme nous parce qu’ils ont des équivalents en français de bien des expressions anglo-saxonnes. Tenez, par exemple, dans son mail, Ronron m’écrivait :

« Nous sommes déménagés et maintenant bien installés dans notre nouveau condo. »

L’utilisation du verbe « être » devant « déménagés » n’est pas une faute, elle reflète un anglicisme. Le déménagement étant terminé, ils sont désormais dans la situation de gens qui ont déménagé et donc, ils sont déménagés (« we are relocated », dirait-on en anglais).

Le mot « condo » n’est employé qu’en Amérique du Nord. Il s’agit d’une forme abrégée d’un mot latin, condominium, qui veut dire « en copropriété » (cum dominium). Un condo, c’est un appartement. En français, le mot condominium est employé dans un autre sens, celui de territoires gérés par deux pays différents. Par exemple, les Nouvelles-Hébrides ont longtemps été un condominium franco-anglais.

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La suite de la phrase de Ronron est, elle aussi, marquée par une terminologie typiquement anglaise traduite mot à mot en français : « on est les seuls pour l’instant dans le bloc de six unités ». Un bloc, c’est un ensemble d’immeubles délimité par les quatre rues qui les entourent. Ici, cet ensemble est formé de six immeubles.

Et là, j’ai repensé aussitôt à une info surprenante et fascinante que j’ai lue il y a environ un mois. Figurez-vous qu’il existe en Chine une ville pouvant accueillir un million d’habitants et qui est… totalement déserte.

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Elle s’appelle Ordos, elle se trouve en Mongolie intérieure chinoise, une région minière. C’est pour faire face à l’explosion d’activité industrielle liée aux richesses du sous-sol qu’elle a été bâtie. Sauf que personne n’est jamais venu y vivre. Les gens préfèrent demeurer dans une autre ville à une demi-heure de là.

Ordos a pourtant tout ce qu’il faut : des tours de bureaux, des centres administratifs, des bâtiments gouvernementaux, des musées, des théâtres, des terrains de sport, des monuments, des quartiers de maisons individuelles et de bungalows, des immenses avenues pour éviter les problèmes d’embouteillages.

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Mais pas un seul habitant.

Les seuls humains qu’on y croise sont les quelques dizaines de fonctionnaires chargés de son entretien. Entretien relativement limité puisque personne ne vient salir quoi que ce soit. Ordos est devenue le paradis des skaters. Ils peuvent faire des kilomètres à travers la ville sans que personne ne trouve rien à y redire.

J’ai envoyé le lien à Ronron. J’espère qu’après ça, lui et Lison vont se sentir moins seuls dans leur condo au milieu d’un bloc de six unités.

Très belle journée à vous

Photos de Ronron et Lison : notre première rencontre physique le 20-07-2007 et un échange par webcam en mars 2008.
Photos d’Ordos publiées dans Time, plein d’autres à cette adresse : « Ordos, China: A Modern Ghost Town« .

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