Terrorisme Ordinaire

427054410.jpg

« Pour la nature, c’est tous les jours le 11 septembre »

En complément de la note de Miss You Egoïsme Ordinaire que je viens de lire et en réponse, peut-être, à la question de Catherine « Ici, c’est plutôt la flemme ! je suis là alors pas besoin d’apprendre ! Si vous avez des tuyaux... », quelques images chocs de l’excellente campagne publicitaire de la Fondation Nicolas Hulot qu’on peut, si besoin, afficher partout chez soi jusqu’à ce que ça rentre !

Piqûre de rappel.

874594881.jpg
1419861061.jpg
nicolas-hulot1-copie.jpg

Tellement plus proche de la réalité que ces photos à la nouille qui sont tout à fait, par contre, à l’image de l’irresponsabilité moyenne : Un bébé entre les pattes d’un ours ! Non, mais ceux qui font des trucs pareil ne connaissent rien à la nature, ils ont jamais lu Umberto Eco* non plus ! (oui, ça m’énerve !)

505948299.jpg

Et puis, peut-être, parler aussi de ceci : Un continent de détritus

318344461.jpg

Et, quoi qu’on en dise, nous sommes tous responsables, à un degré plus ou moins important et non, faire attention ne signifie pas retourner au Moyen-Âge.

anti

* Lire ou relire, l’excellent « Comment parler des animaux » dans « Comment voyager avec un saumon ? » de Umberto Eco

4 Replies to “Terrorisme Ordinaire”

  1. anti

    La voilà !

    « Comment parler des animaux » Umberto Eco.

    Au cas où vous ne seriez pas des enragés de l’actualité, cette histoire s’est passée a New York il y a quelque temps.

    Central Park, jardin zoologique. Des enfants jouent près de la fosse aux ours blancs. L’un deux défie les autres de se baigner et de nager autour des ours. Pour obliger ses copains à plonger, il planque leurs vêtements, les gamins se jettent à l’eau, barbotent autour d’un bon gros nounours placide et somnolent, ils l’asticotent, le bestiau en prend ombrage, allonge une patte et bouffe ou plutôt grignote deux bambins, laissant traîner çà et là quelques menus morceaux. La police accourt, le maire se précipite, on se demande si il faut ou non tuer l’ours, on reconnaît que ce n’est pas de sa faute, on écrit quelques articles à sensation. Comme par hasard les enfants avaient des noms espagnols : des Portoricains, de couleur peut-être, fraîchement débarqués sans doute, des habitués de la bravade certainement, comme c’est le cas de tous les gosses qui s’unissent en bandes dans les quartiers pauvres.

    Interprétations diverses, toutes plutôt sévères. La réactions cynique prévaut, du moins oralement : sélection naturelle, s’ils étaient assez stupides pour nager près d’un ours, ils l’ont bien cherché, moi, même à cinq ans, je ne me serais jamais jeté dans la gueule du loup. Interprétation sociale : poches de pauvreté, manque d’éducation, hélas, on est sous-prolétaire jusque dans l’imprudence, dans l’inconséquence. Allons donc, de quel manque d’éducation parle-t-on, quand même l’enfant le plus pauvre regarde la télé et lit en classe des livres où les ours dévorent les hommes et où les chasseurs les tuent ?

    Et je me demande si ce n’est pas justement parce qu’ils regardent la télé et vont à l’école que les gamins sont entrés dans la fosse. Ces gosses ont sans doute été victimes de notre mauvaise conscience revisitée par l’école et les médias.

    Les êtres humains ont toujours été impitoyables avec les animaux, et quand ils se sont aperçus de leur propre méchanceté, ils se sont mis, sinon à les aimer tous (car ils continuent tranquillement à les manger), du moins à parler d’eux en bien. Si l’on songe que les médias, l’école et les services publics ont à se faire pardonner un tas de choses commises contre les hommes, ça devient payant (d’un point de vue psychologique et éthique) de vanter la bonté des animaux. On laisse crever les mômes du Tiers-Monde, mais on invite les enfants du Premier à respecter les libellules et les petits lapins, mais aussi les baleines, les crocodiles et les serpents.

    En soi, une telle action éducative est correcte. L’erreur c’est la technique choisie : pour reconnaître aux animaux le droit à la survie, on les à humanisés et infantilisés. On ne dit pas qu’ils peuvent survivre même si, selon leurs instincts, ils sont sauvages et carnivores. On les rend respectables en en faisant des êtres aimables, drôles, bons enfants, bienveillants, sages et prudents.

    Rien n’est plus étourdi qu’un lemming, plus fainéant qu’un chat, plus baveux qu’un chien en août, plus puant qu’un putois, plus hystérique qu’un cheval, plus crétin qu’une phalène, plus gluant qu’une limace, plus venimeux qu’une vipère, moins imaginatif qu’une fourmi et moins musicalement créatif qu’un rossignol. Simplement, il faut aimer ces animaux et les autres et, si vraiment cela nous est impossible, tout du moins les respecter pour ce qu’ils sont. Les légendes de jadis forçaient sur le grand méchant loup, celles d’aujourd’hui exagèrent avec les gentils petits loups. Il ne faut pas sauver les baleines parce qu’elles sont sympas, il le faut parce qu’elles font partie de l’environnement naturel et contribuent à l’équilibre écologique. Au lieu de cela, nos gosses sont éduqués à coups de dauphins parlants, de chiens ou de kangourous basketteurs et surtout de Teddy Bear à tire-larigot.

    La pub, les dessins animés, les BD sont pleins d’ours bons comme le bon pain, respectant les lois, câlins et protecteurs. C’est insultant pour un ours de s’entendre dire qu’il a le droit de vivre parce qu’il est grand et gros, balourd et bonasson. Voilà pourquoi je pense que les pauvres mômes de Central Park sont morts non par défaut mais par excès d’éducation. Victimes de notre conscience malheureuse.

    Pour leur faire oublier combien les hommes sont méchants, on leur a raconté que les ours sont bons. Au lieu de leur dire loyalement ce que sont les hommes, ce que sont les ours.

    Anti

  2. anti

    Oh ben là, ce livre, j’en parle souvent. Eco est brillant et j’apprécie beaucoup. Pour la nouvelle (1987), je viens de la trouver et de la mettre en commentaire.

    Enjoy !

    anti

  3. Anna Galore

    Le livre est vraiment très agréable à lire, je l’ai lu il y a trèèèèèèès longtemps.

    L’extrait que tu donnes, Anti, est génial !!!

    « Il ne faut pas sauver les baleines parce qu’elles sont sympas, il le faut parce qu’elles font partie de l’environnement naturel et contribuent à l’équilibre écologique. « 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *