
Silhouette dressée face aux abîmes,
Maître des lieux au regard vaste,
Ta veine de force
Traverse tes blanches oscillations de coton
Et agite tes longues mèches noires. »
Hier midi, j’ai fait une très belle rencontre, celle de Kathy Dauthuille, à travers son livre « Tisserand du Soleil » paru aux Editions Thélès.
« Tisserand du Soleil » est un conte, un conte Kogi, ce peuple dont j’ai déjà parlé sur le blog dans une note intitulée Tchendukua /// Le Peuple Kogis.

Ce livre, c’est 100 pages, pas une de plus, pas une de moins, d’un hommage vibrant à ceux qui règnent encore sur la Cordillère des Andes.
Sous la forme de 36 mélopées, nous assistons à la naissance d’une amitié entre le narrateur et un tisserand kogi. Cette rencontre est à l’origine d’un dialogue qui nous introduit au cœur d’une culture méconnue, avec ses rituels, ses paysages montagneux et sa religion.
C’est doux comme l’argile, beau comme le ventre rond d’une femme qui va donner la vie. J’ai trouvé des passages vraiment fantastiques, en résonance parfaite avec nos mots à Anna & moi hier dans nos échanges avec la nature, avec ceux de Michel Rauscher aussi lorsqu’il exprime sa fascination pour les poteries…
Extrait :
– C’est quoi un pot pour toi ? me demanda-t-il.
« Quelle question ! » me dis-je en moi-même, et dépassant mon embarras, je lançai :
– Un pot, c’est un récipient pour contenir quelque chose.
– Mais encore ? J’eus un flash. Cet objet ressemblait à la fois à son « poporo » et au pot entouré de cuivre rouge que certaines peuplades consiéraient comme un symbole de féminité. J’ajoutai :
– Le ventre de la femme, non ?
– Oui, un pot c’est de la terre-matrice, c’est de l’argile pressé entre les doigts avec amour.
– Une création en quelque sorte.
– Un pot, c’est le don qui ne quittera pas la tribu car cet objet ne se transporte pas, il reste là où il a été façonné.
– En lien avec elle et le lieu, murmurai-je.
– Un pot, ça se modèle en disant des paroles sacrées ; on le cuit, on le bénit, il renferme des pouvoirs extraordinaires, expliqua-t-il avec gravité.
– Comme un talisman alors ?
– Là est son pouvoir; né d’une spirale, un pot peut contenir de l’eau, des aliments…
– Certes… -dis-je sur un ton évident- et pourtant quand il est vide, il y a tout l’appel de la cavité.
– Regarde en face de toi, là-haut, au sommet du toit de paille.
Je clignai des yeux, la lumière était trop forte… Mais peu à peu je distinguai un petit pot et des bâtons à l’intérieur.
– Jusque sur les toits ! On dirait presque des nids d’oiseaux !
– Le principe masculin et le principe féminin, toujours en équilibre, rappelle-toi.
– Oui, mais dans la nuit des temps, le pot est sans doute le premier objet façonné à partir de la terre.
– Bien sûr, mais ce que tu ne sais pas, c’est qu’il peut contenir des paroles et même des pensées.
Alors, je l’approchai de mes lèvres et dis dans la vasque sombre :
– Tes paroles me vont droit au coeur.
Et je lui rendis le pot.
Il le considéra avec beaucoup d’attention et souffla ces mots dans l’urne de terre :
– Tu es mon petit frère.
Mais qui est Kathy Dauthuille ? Une nîmoise d’adoption, la cinquaine souriante, passionnée de symboles, auteur de plusieurs romans et poèmes, traductrice de l’espagnol vers le français de son état.
En 2003, elle rencontre le chamane Atawallpa Oviedo dont elle traduit des textes puis deux livres aussi alléchants l’un que l’autre : Les Fils de la Terre et Les Marcheurs de l’Arc-en-ciel.
A voir, cette vidéo de Kathy DAUTHUILLE sur AgoraWeb..
Et pour info, Stage avec Atawallpa Oviedo en Mai 2009.
anti
Cet extrait est à la fois d’une grande beauté et d’une simplicité apaisante. J’ai eu grand plaisir à le dicter à Anti lorsqu’elle a préparé cette note et il me tarde de lire, à mon tour, le livre dans son entier.
Très beau texte et réflexions profondes.
A propos de jarres, un extrait de récit de voyage dans le désert lybien en Egypte (I-Voyages.net) :
« Situé à 250 km au sud ouest de l’oasis de Daklha et découverte par le Dr Ball en 1917, les deux buttes d’Abu Ballas abritent des restes de jarre. Deux types de jarres coexistent : les rondes (jarres) datant de 2000 ans avant Jésus Christ et les pointues (amphores) beaucoup plus récentes. Selon le Dr Ball et le prince Kemal el Dine, tous deux explorateurs du début du XXe siècle, le dépôt de jarres représentait un potentiel de 9 000 à 16 000 litres d’eau. Pourquoi autant d’eau au milieu de rien ? Il s’agit selon toute vraisemblance d’une relais en approvisionnement des caravanes reliant Dakhla à Koufra en Libye. Le site se situe en effet au 1/3 du trajet. Le second tiers se situant dans le Gilf el Kebir…. »
Ces jarres sont fascinantes de beauté.
En écho aux mots que j’avais écrit dans « Des racines et des L », le soir même, j’ai lu cet autre passage :
« En ce territoire, tout est vivant ; le terre est un grand corps aux cheveux d’arbres, aux veines d’eau et aux os de roche.
C’est en union avec la mère-nature que les liens visibles ou non, se créent, se répondent, s’étoffent, se construisent, s’alimentent et se multiplient. »
Ce livre est un bonheur, de celui que procure la lecture des « Secrets du Jaguar » ou de « La montagne ensommeillée ».
anti
J’aimerais connaître les auteurs des livres que vous citez « Secrets du Jaguar » et « La montagne ensommeillée ».
Merci
Merci pour les liens Miss Tinguette et merci de votre passage chez nous Kathy. Je suis certaine que vous allez adorer ces ouvrages quand vous les lirez. Vous pouvez les trouver d’occasion je pense, car ils ne sont pas forcément disponibles encore.
Un autre lien qui peut vous intéresser : http://www.annagaloreleblog.com/archive/2008/05/26/presence-des-chamanismes.html
Une question me taraude : vous les avez rencontré ces indiens Kogis ? Et si oui, comment cela s’est-il passé ?
anti
En fait je ne suis pas allée en Colombie ; j’ai lu les premiers articles sur les Kogis dans un reportage de ‘Nouvelles Clefs’, j’ai été émerveillée par les photos et je me suis mise à lire tout ce que disait Eric Julien sur eux. Puis j’ai lu divers livres, ai vu des reportages et me suis déplacée à Toulouse pour voir un Indien kogi.
Après avoir accumulé les renseignements, je me suis, si l’on peut dire, branchée sur eux et mentalement j’étais avec eux ; il s’est d’ailleurs passé des sortes de connexions sur un plan subtil, et de là est né ce livre.
Magnifique ! C’est clair que c’est écrit avec eux. J’en connais pas mal ici qui vont voyager avec le « Tisserand du soleil ». Pour ma part, je marche doucement, et arrive tranquillement à la 31e mélopée.
Merci pour tout.
anti
il s’est d’ailleurs passé des sortes de connexions sur un plan subtil, et de là est né ce livre.
ce que vous dîtes là me touche particulièrement Cathy, puisque j’ai vécu le même type d’expérience que vous, à la suite de conférences et de cercle de tambours.. Le coeur de nos grands frères Kogis nous suit et nous acocmpagne avec tant de sagesse et de compassion.
je vais donc lire votre livre, de tout coeur. :-))
sapotille, pas une brindille de plus pas une de moins.
Merci Sapotille ; les conférences que vous avez suivies étaient aussi sur les Kogis ? et les cercles de tambours ont été faits par rapport à eux ? ou était-ce en dehors ? Puis-je savoir ce que vous aviez vécu ?
Oui, oui et… non pas ici mais en privé si vous le voulez.. demandez mon mail à Anna ou Anti. 🙂
Je viens de rajouter un lien vers une vidéo de Kathy : http://www.agorawebtv.fr/
Trop bien !
anti
Et moi, je viens de rajouter « Tisserand du soleil » dans la section « Petits livres entre amis ».
http://www.annagaloreleblog.com/archive/2009/04/07/petits-livres-entre-amis.html
Je viens de voir cette chanson de Yves Duteil : étonnant !
Paroles Yves Duteil Tisserand
Mon ami Tisserand
Partager Clip Tisserand
Tu tisses avec les fils du temps
La vie n’est qu’un fil éphémère
Chacun la tisse à sa manière
A la mesure de son talent
Depuis la nuit des temps
Si tu devais tisser l’histoire
Avec le fil de ta mémoire
Et rattraper le temps perdu
Comment t’y prendrais-tu… ?
Mon ami Tisserand
Si tu devais tisser le temps
Le temps sans fin se renouvelle
Il faudrait un fil éternel
Dont chaque point serait le monde
Enchaînant les secondes
Entre elles
Le présent n’est qu’une étincelle
Qui court sur un fil de dentelle
Pour assembler tous ses dessins
Qui sont à nos destins
Fidèles
Tisserand mon ami
Si tu devais tisser ceci… ?
Apprends-moi l’art de la lumière
Et tu verras que pour lui plaire
Je tisserai le fil de l’eau
Pour en faire un ruisseau
Peut-être même un univers
S’il faut tisser ma vie entière
A la mesure de son amour
Et faire au fil des jours
Un enfant, Tisserand,
Si beau serait alors le temps…
Le temps de n’être plus qu’à elle
Qu’il faudrait un fil éternel
Aussi puissant qu’un océan
Mais doux comme un instant
Près d’elle
Le temps nous enroule et nous mêle
Il faudrait deux fils de dentelle
Aux couleurs pâles, un peu fragiles
Noués autour d’un fil
De miel
Mon ami Tisserand
Si tu voulais tisser ce temps…
Moi j’écris des chansons nouvelles
Mais quelles que soient mes ritournelles
je garderai du fil des mots
Le plus bel écheveau
Pour elle
Le fil des jours est un mystère
Mais si chacun à sa manière
A la mesure de son talent
Pouvait tisser son temps,
Tiserand, c’est ainsi
Que je voudrais tisser ma vie.
Et bien voilà.. je viens de relire ce magnifique fil de lumière (Tissearnds du soleil), apte à relier nos coeurs, toute les formes de vies et tous les modes d’existence, sous le regard bienveillant de nos grands frères… les kogis.
Mille mercis, Kathy, encore une fois, pour ton regard ton souffle et ton don de subtile et joyeuse transmetteuse!
Merci sapotille ! tes mots me touchent beaucoup.