Quarante ans de réchauffement en deux cartes

global warming 70-2000.jpgVous trouvez que l’hiver s’annonce froid, cette année ? Toutes ces images de chutes de neige d’une ampleur rare sur une bonne partie de l’Europe – il n’y a pas que le nord de la France – que les télés diffusent depuis maintenant trois semaines peuvent donner à le penser.

D’un point de vue météorologique, le phénomène n’a rien de mystérieux. Une masse d’air froid descend du pôle, comme tous les ans à la même époque dans notre hémisphère. Sauf que, la banquise ayant diminué, tout l’équilibre qui prévalait au siècle dernier s’est déréglé. La masse d’air froid rencontre une masse d’air chaud qui, elle, ne s’est pas évacuée assez vite vers le sud. La rencontre de ces deux masses d’air dans un ciel chargé de nuages fait qu’au lieu d’avoir de la pluie, on a eu de la neige, plein de neige, depuis fin novembre.

Nous, à Nîmes, on est dans la partie « masse d’air chaud » (toute proportion gardée, bien sûr – c’est quand même l’hiver). Les étourneaux le savent bien, eux qui, il y a encore dix ans, migraient depuis des siècles tous les hivers vers le nord de l’Afrique. Depuis le début des années 2000, ils s’arrêtent dans le sud de la France. Il fait déjà assez chaud pour eux pour y passer la période hivernale. Et ils sont plus nombreux chaque année, nous vous le montrons régulièrement sur le blog.

La NASA vient de rendre publique une illustration qui permet de voir les choses de façon plus globale – non plus à l’échelle du mois ou de l’année mais à celle de plusieurs décennies. Il s’agit de deux cartes juxtaposées. Elles montrent les anomalies de températures relevées dans la décennie 1970-1979 (en haut) et dans la décennie 2000-2009 (en bas).

Attention, il ne s’agit pas de températures absolues, mais de l’intensité avec laquelle un endroit donné du globe est plus chaud ou plus froid que ce qu’il était pendant une période prise comme référence. Cette période de référence est ici celle allant de 1951 à 1980. Pourquoi 1951-1980 ? Parce que les services météo américains utilisent des périodes de 30 ans pour définir une moyenne qui ait un sens. De plus, nombreux sont ceux qui, parmi nous, sont nés dans ces années-là et peuvent s’y référer.

DSCN0842.jpgSi vous avez lu mon article sur le réchauffement climatique, vous vous rappelez certainement que la grosse différence entre météo et climat, c’est l’échelle de temps. Ce n’est pas parce qu’il fait froid tel hiver en France que le climat se refroidit, ni parce qu’il fait chaud tel été qu’il se réchauffe. Il s’agit de fluctuations locales qu’on ne peut pas interpréter globalement. Par contre, l’évolution sur une ou plusieurs décennies, elle, reflète bien une évolution du climat, surtout si elle est mesurée non pas dans un seul pays en particulier, mais sur l’ensemble de la Terre, y compris à la surface des océans. Et là, on constate un réchauffement continu, décennie après décennie, depuis les années 70 jusqu’à aujourd’hui.

Pour revenir aux deux cartes, elles montrent de façon frappante l’évolution des températures moyennes entre la décennie des années 70 et celles de la première décennie des années 2000. On voit aussi que ce qui se réchauffe le plus vite, ce sont les pôles, en particulier dans l’hémisphère nord où se trouvent beaucoup plus de terres émergées que dans le sud. La répartition des masses d’air est ainsi perturbée de façon de plus en plus aiguë d’une décennie sur l’autre. Les conséquences sont que non seulement notre Terre se réchauffe globalement mais que son climat se dérègle un peu partout par rapport à ce qu’il a pu être depuis que nous avons vu le jour.

Le résultat le plus visible en est des évènements météo de plus en plus intenses et de moins en moins exceptionnels. L’année 2010 en a connu un nombre considérable. J’en ai cité la plupart dans ce même article sur le réchauffement climatique, écrit en septembre dernier mais remis à jour pour les derniers mois de l’année.

Pour finir, je vous recommande la lecture d’un excellent article de Pierre Barthélémy sur Slate. Il revient sur un livre consacré au phénomène du négationnisme climatique, longtemps mené par Claude Allègre et Vincent Courtillot en France. Un extrait : «Tous mentent. Claude Allègre et Vincent Courtillot ne peuvent d’ailleurs plus plaider la bonne foi. Comme l’écrit avec retenue Stéphane Foucart, “la persistance à reproduire des erreurs pourtant portées à la connaissance de leurs auteurs ne peut parfois pas s’interpréter autrement que comme une volonté délibérée de tromper le public”

9 Replies to “Quarante ans de réchauffement en deux cartes”

  1. Anna Galore Post author

    A croire qu’on s’est donné le mot… Il y a justement aujourd’hui dans 20 Minutes un article qui parle du réchauffement climatique comme étant la cause des hivers plus rigoureux que nous connaissons en Europe depuis quelques années.

    Extraits :

    « Le fait peut sembler étrange et pourtant, selon des scientifiques, les hivers rigoureux qui se succèdent en Europe depuis dix ans sont liés, en grande partie, au réchauffement climatique.

    […] une nouvelle étude va plus loin, et montre que la hausse du thermomètre est précisément à l’origine de ces hivers enneigés et particulièrement froids.

    Le coupable serait la fonte de la calotte glaciaire arctique. Le réchauffement, deux à trois fois supérieur à la moyenne, a entraîné sa réduction de 20% ces 30 dernières années. Elle pourrait même disparaître entièrement durant les mois d’été d’ici la fin du siècle.

    Les rayons du soleil, qui ne sont plus repoussés par la glace, réchauffent encore un peu plus la surface du globe à cet endroit. Une mer sans glace, et c’est tout le système de pressions qui s’en trouve bouleversé.

    «Mettons que l’océan soit à zéro degré», explique mardi à l’AFP Stefan Rahmstorf, spécialiste du climat au prestigieux Institut Potsdam (Allemagne) pour la recherche sur l’impact climatique. «Il est ainsi beaucoup plus chaud que l’air ambiant dans cette zone polaire en hiver. Vous avez alors un important flux chaud qui remonte vers l’atmosphère, que vous n’avez pas quand tout est recouvert de glace. C’est un changement énorme», ajoute-t-il.

    Le résultat, selon une étude publiée au début du mois par le Journal de Recherche Géophysique, est un système de hautes pressions qui pousse l’air polaire, dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, vers l’Europe.

    «Ces anomalies pourraient tripler la probabilité d’avoir des hivers extrêmes en Europe et dans le nord de l’Asie […]

    Les chercheurs soulignent que ces hivers particulièrement froids en Europe ne reflètent pas la tendance globale constatée sur l’ensemble du globe, où 2010 devrait être l’une des trois années les plus chaudes jamais enregistrées.

    «Quand je regarde par ma fenêtre, je vois 30 cm de neige et le thermomètre dit -14°», raconte M. Rahmstorf, qui s’exprimait au téléphone depuis Potsdam. «En même temps, au Groenland, nous sommes au-dessus de zéro en décembre». »

    Source : 20 Minutes / AFP

  2. anti Post author

    Les cartes font froid dans le dos. Je ne crois plus qu’on puisse revenir en arrière maintenant.

    Je repense à la marionnette d’Eva Joly vue aux Guignols hier soir et je ne trouve pas ça très drôle…

    anti

  3. anti Post author

    Netsah ?

    Mdrrr !

    « Je n’arrive pas à m’expliquer cette volonté de tromperie persistante. Quel intérêt espèrent-ils en tirer ? »

    P’t’être le même qui fait que certains s’en foutent plein les poches et font travailler des gens dans des conditions misérables ? P’t’être le même qui fait que certains empoissonnent la terre ? P’t’être le même qu’on laisse mourir une partie du monde sans sourciller ?

    anti

  4. Grosnounours Post author

    Bien sur, comme d’habitude diront les mauvais esprits, je n’adhère pas au pessimisme ambiant. Les évènements de 2010 n’ont pas été qu’extrêmes, fort heureusement. D’ailleurs, à ce propos, en termes d’ouragans au niveau global, cette année a été (je fournirai mes sources ultèrieurement, j’ai la flemme ce soir), l’une des plus faibles enregistrée (c’est curieux que personne n’en parle!). Ceci dit, je n’oublie pas notre second pari, Anna, je crois que ça risque d’être beaucoup plus serré, et même perdu pour moi sur le seul Atlantique Nord.

    @Anti : Tu sais, je m’en fous plein les poches, je fais travailler des gens dans des conditions misérables, j’empoisonne la terre, et je laisse mourir une partie du monde sans sourciller… Je me demande même comment je ne suis pas encore en taule… En fait, ce doit être parce que je ne m’en fous pas assez plein les poches, je ne fais pas travailler assez de gens dans des conditions misérables (à moins que je ne les fasses pas travailler dans des conditions assez misérables), je n’empoisonne pas assez la terre, et la partie du monde que je laisse mourir sans sourciller est trop petite.

  5. Anna Galore Post author

    « Les évènements de 2010 n’ont pas été qu’extrêmes, fort heureusement.  »

    Pas que, en effet. Mais vus à l’échelle de décennies (et non de mois ou d’années), celle-ci est pourtant devenu la plus chaude de l’histoire depuis qu’on fait des relevés météo (1880).

    « @Anti : Tu sais, je m’en fous plein les poches, je fais travailler des gens dans des conditions misérables, j’empoisonne la terre, et je laisse mourir une partie du monde sans sourciller »

    Disons que tu es au minimum un allié objectif de ces gens-là.

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