Kashmir à l’égyptienne, renversant

Hier, en cherchant des morceaux à passer sur mon smartphone pour les accompagner à la batterie à titre d’exercice, je suis tombé sur une incroyable version de Kashmir. Elle a été enregistrée en 1994 à Marrakech, quatorze ans après la fin de Led Zeppelin, pour l’album « No Quarter » mené par le duo Robert Plant / Jimmy Page, un opus qui contient plusieurs compositions originales et quelques reprises de standards de Led Zep.

plant page unledded

Parmi ces dernières, Kashmir, l’un des chefs d’oeuvre du groupe. Son balancement hypnotique est dû au fait que le thème joué à la guitare est en trois temps alors que la batterie est en quatre temps, ce qui crée un décalage permanent entre les temps forts joués par la guitare et ceux joués par la batterie. Tout le monde se retrouve ensemble tous les douze temps : au bout de de quatre mesures à trois temps (qui constituent le thème de base) pour la guitare et de trois mesures à quatre temps pour la batterie.

Côté harmonie, la guitare est accordée en DADGAD (Ré, La, Ré, Sol, La, Ré, au lieu de Mi, La, Ré, Sol, Si, Mi), ce qui permet de faire des variations d’accords particulières avec des doigtés simplifiés. Cela donne un son à la tonalité orientale, ce qui n’a rien d’un hasard puisqu’il s’agit de la façon normale d’accorder un sitar. (Une parenthèse : Keith Richards l’a utilisé sur « Can’t you hear me knocking » entre autres, pour faire des enchaînements d’accords qui semblent compliqués alors qu’il les joue quasiment avec un seul doigt en travers du manche ; il a utilisé une astuce analogue pour « Jumpin’ Jack Flash »).

Pendant tout le déroulement du thème principal, la guitare place sur le troisième temps une note de Ré basse (la première corde, qui est jouée à vide et résonne librement), produisant un effet de bourdon qui contribue à l’ambiance hypnotique du morceau (une figure très fréquente dans la musique indienne ou celte).

La version de Kashmir qui figure sur l’album a été enregistrée en public, sans aucune retouche ou effet spécial a posteriori en studio. Aux côtés de Plant et Page, on trouve Mike Lee à la batterie (disparu en 2008), Charlie Jones à la basse et, last but not least, un excellent ensemble traditionnel de musique égyptienne ainsi qu’une section à cordes du London Symphony Orchestra.

Le résultat est d’une richesse rare. Non seulement Mike Lee déploie, avec une énergie phénoménale, un jeu superbe, puissant et épuré que n’aurait pas désavoué le regretté John Bonham, mais l’ajout des instruments égyptiens est un vrai coup de génie de la part du duo Page / Plant. Mention spéciale aussi pour Ed Shearmur à l’orgue, qui est l’auteur des arrangements orchestraux pour les musiciens classiques et égyptiens.

Probablement la plus fascinante version de Kashmir que je connaisse.

Enjoy !

En complément, une interview très intéressante du bassiste Charlie Jones à lire ici.

One Reply to “Kashmir à l’égyptienne, renversant”

  1. Le Chef

    Yôhôhôôô !

    Le retour de la Gretsch a déjà frappé !!!
    ….Grâce à elle nous avons droit à une véritable pépite :
    Kashmir à l’égyptienne !
    Au départ le morceau était déjà d’enfer mais cette version est du feu de dieu !
    Un vrai régal … qui dure 12 minutes, royal.
    Je n’ai pas fini nini de l’écouter, encore et encore.
    Et, je dois le dire, avec les commentaires et le décorticage de pro d’Anna c’est un dessert de meilleur ouvrier de France !
    Arrrrghhhh……Jumpin’ Jack Flash !
    Bon entrainement Anna, bonne muscu et n’hésite pas à chercher d’autres morceaux…..

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