Cinq ans en 200 dates pour prendre la mesure de la casse

C’est un article de Sophie Dufau sur Médiapart. De la lettre de Guy Môquet aux suppressions de postes de fonctionnaires, de la maison à 15 euros à La princesse de Clèves, du bouclier fiscal à la loi sur la récidive, inventaire du quinquennat.

Vous pouvez aussi le lire sur le blog La chèvre de garde de la vallée.

En voici le début…

6 mai 2007: LA NUIT DU FOUQUET’S: Au commencement était le clan. Pour fêter la victoire, Cécilia Sarkozy (pourtant absente une grande partie de la soirée) a organisé un diner au restaurant des Champs Elysées, le Fouquet’s. S’y retrouvent des effigies du sport, des figures du capitalisme entrepreneurial, des patrons de journaux, des icônes du cinéma, de la télé et de la variété, des symboles de la mode. En si bonne compagnie bling-bling, Nicolas Sarkozy fera attendre ses électeurs place de la Concorde.

7 mai 2007: YACHT DE BOLLORÉ. Durant la campagne de 2007, Nicolas Sarkozy avait annoncé que s’il était élu, il se retirerait un instant, s’effacerait pour méditer et « habiter la fonction ». En fait de retraite, il se voit offrir une escapade luxueuse sur le yacht de Vincent Bolloré (invité au Fouquet’s), le Paloma, avec sa femme et son fils, au large de Malte. Retour précipité devant les tollés.

16 mai 2007: GUY MÔQUET. Première décision du nouveau président de la République : Nicolas Sarkozy annonce que « la lettre d’adieu de Guy Môquet à ses parents » devra désormais être lue chaque 22 octobre, dans tous les lycées de France. Guy Môquet, résistant communiste de 17 ans, fut exécuté en 1941 par les Allemands, avec 26 autres otages. L’utilisation politique de cette lettre offusque et la lecture de la lettre tombe dans les oubliettes.

18 mai 2007: 1er GOUVERNEMENT. Formation du premier gouvernement de François Fillon. Naissance du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire, confié à Brice Hortefeux. Ouverture à gauche : Bernard Kouchner (Affaires étrangères), Éric Besson (secrétaire d’Etat de la Prospective et de l’évaluation des politiques publiques) ; Jean-Pierre Jouyet (secrétaire d’État aux Affaires européennes) et Martin Hirsch (Haut commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté) entrent aux gouvernement. Fadela Amara suivra le 19 juin 2007.

23 mai 2007: UN PROCHE À LA POLICE. Nicolas Sarkozy nomme Nicolas Péchenard, ami d’enfance du président, à la tête de la Direction générale de la police nationale. Le rapprochement des Renseignements généraux (RG) et de la Direction de la surveillance du territoire (DST) se concrétise. Avec Michel Delpuech, directeur de cabinet de Michèle Alliot-Marie (et ancien préfet des Hauts-de-Seine), Nicolas Sarkozy veille sur la police.

22 juin 2007: UN PROCHE À TF1. Laurent Solly, ancien directeur adjoint de la campagne de Nicolas Sarkozy, est officiellement nommé directeur général adjoint du groupe TF1. Une nomination annoncée un mois auparavant par Franck Louvrier, chargé de la communication à l’Élysée. À TF1, toujours, en juillet 2008, Jean-Claude Dassier est nommé directeur de l’information. Arnaud Dassier, son fils, était responsable Internet de la campagne de Nicolas Sarkozy.

27 juin 2007: UN PROCHE A LA DST. Bernard Squarcini, ami de longue date de Nicolas Sarkozy, est nommé directeur de la surveillance du territoire, en remplacement de Pierre de Bousquet de Florian qui devient préfet des Hauts-de-Seine. Un an plus tard, le 1er juillet 2008, la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) est créée à l’issue de la fusion entre les RG et la DST. La DCRI s’installe à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine). Bernard Squarcini en prend la direction. Les structures et le fonctionnement de la DCRI sont couverts par le « Secret Défense ».

5 juillet 2007: CLEARSTREAM, À L’ATTAQUE ! Deux juges et des policiers perquisitionnent au domicile de Dominique de Villepin, dans le cadre des faux listing de la société Clearstream. Dans ces listes falsifiées, l’enquête fera apparaître 228 noms dont celui de Nicolas Sarkozy. Quinze jours après, Dominique de Villepin est mis en examen pour « complicité de dénonciation calomnieuse» et «complicité de vol ». Deux ans plus tard, le 23 septembre 2009, depuis New York, le chef de l’État s’exprime au sujet de l’affaire dont le procès vient de commencer : « Deux juges d’instruction ont estimé que les coupables devaient être traduits devant un tribunal correctionnel ». « Coupables »… Villepin dépose plainte contre le président pour « atteinte à la présomption d’innocence ». Au final, le 2 mai 2011, après le procès en appel, Dominique de Villepin est relaxé. La thèse d’un complot ordonné par ce dernier contre Nicolas Sarkozy s’est effondrée.

24 juillet 2007: INFIRMIÈRES BULGARES. Cinq infirmières et un médecin bulgares arrêtés en Libye le 9 février 1999, et accusés d’avoir inoculé le virus du sida à 393 enfants, sont libérés. Cécilia Sarkozy, l’épouse du président, joue un rôle très actif dans cette affaire diplomatique. Elle se rend une première fois en Libye, le 13 juillet, et y retourne dix jours plus tard accompagnée de Benita Ferrero-Waldner, commissaire européen chargée des Relations extérieures et de Claude Guéant, secrétaire général de l’Élysée. Cependant, sur ordre de l’Élysée, elle refuse de répondre de son rôle devant la commission parlementaire.

26 juillet 2007: LOI SUR LA RÉCIDIVE. C’était une promesse de campagne, c’est la première loi d’ampleur. Examinée selon la procédure d’urgence, et portée par Rachida Dati, la loi sur la récidive et les peines plancher instaure des peines minimales (de l’ordre d’un tiers des peines maximales encourues) contre les récidivistes. Elle permet aux juges de s’affranchir de l’excuse de minorité pour les récidivistes de plus de 16 ans, et oblige à une expertise psychiatrique avant nombre de remises en liberté. Seules des garanties « exceptionnelles » de réinsertion peuvent permettre d’y échapper. Pour les syndicats de magistrats, cette loi est contraire au principe d’individualisation des peines.

2 août 2007 : VACANCES AMÉRICAINES. Nicolas Sarkozy, son épouse Cécilia et leur fils Louis, accompagnés notamment de Rachida Dati, ont délaissé la résidence d’été des présidents français, à Brégançon, pour séjourner à Wolfeboro une station estivale huppée du New Hampshire aux Etats-Unis. Selon le Boston Globe, la famille Sarkozy réside dans la luxueuse villa d’un ancien dirigeant de Microsoft, louée 22 000 euros la semaine. Qui paye ? « Des amis », fait répondre le Président.

21 août 2007 : BOUCLIER FISCAL. La loi TEPA (travail, emploi et pouvoir d’achat) est promulguée. Le «Travailler plus pour gagner plus» se traduit dans les faits par un bouclier fiscal (qui plafonne l’impôt à 50 % des revenus) pour les plus riches et par la défiscalisation des heures supplémentaires. Une loi qui joue contre l’emploi : les heures supplémentaires sont désormais moins chères que les heures réglées pour un emploi en CDD ou en intérim. Et contre les finances publiques : en 2008, 18 800 personnes ont bénéficié du bouclier fiscal (coût total pour l’Etat, 600 millions d’euros). En 2009, 18 764 contribuables en bénéficient (coût pour l’Etat, 678 millions d’euros). En 2010, 14 443 contribuables en profitent (coût pour l’Etat, 591 millions d’euros).

30 octobre 2007 : 172% D’AUGMENTATION. Les députés accordent 172 % d’augmentation à l’indemnité du président de la République. De 7 084 euros, l’indemnité nette mensuelle du président de la République passe à 19 331 euros.

Et en voici les dernières lignes :

26 avril 2012 : LÉGITIME DÉFENSE. Au lendemain de la mise en examen pour homicide volontaire d’un policier ayant tué un homme armé en fuite, en Seine-Saint-Denis, le candidat Nicolas Sarkozy souhaite que désormais s’applique une « présomption de légitime défense » pour les policiers et gendarmes lorsqu’ils tuent ou blessent quelqu’un dans l’exercice de leurs fonctions. Une proposition de Marine Le Pen, une de plus.

26 avril 2012 : CHÔMAGE MAXIMUM. Le chômage a augmenté en mars 2012, pour le onzième mois consécutif, selon les chiffres publiés par Pôle emploi, les derniers du quinquennat. Le nombre de chômeurs n’ayant pas du tout travaillé au cours du mois précédent (la catégorie A) s’élève désormais à 2 884 500. En juin 2007, la France comptait 1 962 700 chômeurs dans cette catégorie. Leur nombre a donc augmenté de 900 000 sous le mandat de Nicolas Sarkozy, marqué par une grave crise financière et économique.

28 avril 2012: SARKOZY-KADHAFI: LA PREUVE DU FINANCEMENT. Mediapart publie un document officiel libyen, selon lequel le régime de Kadhafi a décidé de débloquer une somme de 50 millions d’euros pour la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007. Le chef des services libyens d’alors y évoque des réunions préparatoires avec Brice Hortefeux et l’intermédiaire Ziad Takieddine. « Ce document prouve qu’on est en présence d’une affaire d’Etat », confirme ce dernier. Une pièce de plus dans une enquête débuté 9 mois plus tôt avec la publication, en juillet 2011, de l’article Sarkozy-Guéant: le grand soupçon libyen.

La liste intégrale est ici : Cinq ans en 200 dates pour prendre la mesure de la casse.

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