Bedzed, un quartier écologique pilote

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Après la Suède avec Hammarby Sjöstad, petit tour en Angleterre pour y découvrir ou re-découvrir un autre modèle d’écoquartier.

Au sud de Londres, le lotissement BedZED détonne… et étonne.

Le complexe à l’architecture futuriste est l’un des plus verts au monde. Son efficacité énergétique est telle que l’hiver, ses résidents n’ont qu’à se faire un thé pour réchauffer leur appartement. Des architectes et des entrepreneurs de partout étudient ce succès britannique en vue d’importer le concept dans leur pays.

Mais pour les habitants c’est aussi vivre sous le regard du monde !

BedZED est un modèle d’architecture verte et de développement durable. Tant et si bien que ses résidents vivent malgré eux sous les feux de la rampe. Allemands, Chinois, Nord-Américains… les nombreux visiteurs se posent la même question : comment les créateurs du complexe sont-ils arrivés à créer une communauté aussi verte ?

Des dizaines de conduits d’air colorés sortent des toits. Les murs face au sud, translucides, sont tachetés de panneaux solaires. De l’autre côté, le toit descend en une jolie courbe végétale où poussent des terrasses. La journée s’annonce chaude et les clématites y sont à leur meilleur. L’allure du complexe rappelle vaguement celle d’un engin spatial. Sur la route, certains automobilistes ralentissent même à son approche. Pas de doute, le Disneyland de la maison verte se trouve bien ici. Même à l’aube, un petit groupe de touristes japonais s’agglutine aux portes. Appareil photo à la main, ils croquent les immeubles, au grand dam des résidents en pyjama qui tirent les rideaux. Les visiteurs se disent intéressés par l’architecture verte, mais de toute évidence, c’est l’aspect futuriste de BedZED qui les captive.

« Je ne le savais pas au moment d’acheter mon appartement, mais je suis chanceux de ne pas vivre dans le premier bâtiment, près de la route, dit un des résidents, Steve Tabard. Ceux qui vivent dans cet édifice en ont marre d’être photographiés. Nous vivons dans un complexe hors du commun et je suppose que nous devions nous attendre à une certaine curiosité. »

Voilà ce qu’espérait son architecte, Bill Dunster. Le professionnel caressait deux espoirs au moment de la construction de BedZED, en 2002:que le lotissement devienne une référence en habitation durable et écologique, et qu’il soit reconnu pour son design tout aussi avant-gardiste. « Nous avons réuni à BedZED les innovations vertes les plus performantes que nous connaissions à l’époque, explique l’architecte. Mais pourquoi s’arrêter là? Célébrons la nouvelle ère dans laquelle l’architecture entre! Il faut oser pour que l’on parle de nous! »

L’architecte a atteint son but:on parle beaucoup BedZED. Tant et si bien que sur la porte de BioRegional, l’organisme qui gère le complexe, un écriteau mentionne que pour une visite guidée du quartier, il faut revenir le mercredi après-midi. Et de préférence réserver sa place. Cette semaine-là, deux groupes de Chinois et une classe d’étudiants allemands exploraient le complexe.

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Un modèle d’économie d’énergie

L’idée d’un écovillage en milieu urbain a été lancée pendant les années 90 par BioRegional – organisme britannique consacré au développement durable -, par l’architecte Bill Dunster et le promoteur Peabody. Elle ne s’est concrétisée qu’en 2002. « Nous avons travaillé pour rien pendant trois ans », se souvient M. Dunster. Le gouvernement a peu appuyé le groupe, si ce n’est que pour acheter le terrain à prix avantageux.

Les créateurs de BedZED ont toutefois conçu un complexe qui produit autant d’énergie que les résidents en consomment. Un défi que des propriétaires isolés se lancent parfois, mais qui relève de l’exploit à l’échelle des immeubles résidentiels. Des panneaux solaires situés plein sud fournissent 15% de l’électricité nécessaire au complexe. Le reste provient de la combustion des branches d’arbres émondées dans les villes environnantes. BedZED possède sa propre petite centrale électrique. Mais les besoins sont minimes. À l’intérieur des 82 appartements, les planchers de béton absorbent la chaleur du soleil pendant le jour et la distribuent pendant la nuit. Les réservoirs d’eau chaude servent aussi de radiateurs.

« Les pertes de chaleur sont tellement minces que quand la maison se rafraîchit trop à mon goût, je me fais du thé, raconte Steve Tabard. La température de la maison augmente sensiblement. Pour la même superficie, ma facture d’énergie n’est plus que le quart de ce qu’elle était dans mon ancien appartement. »

Le soleil est encore bas dans le ciel, et la chaleur dans l’appartement de M. Tabard grimpe. Au milieu de l’entrevue, il se lève et ferme les rideaux. La clarté provient alors du rez-de-chaussée de l’appartement, dont la face sud est ouverte sur les deux étages.

À Londres, les hivers entraînent le mercure autour du point de congélation. Malgré cela, Steve Tabard n’a jamais utilisé son radiateur électrique. La structure du bâtiment est étanche et efficace. En prime, les créateurs l’ont voulu aussi écologique que possible. Plus de la moitié des matériaux utilisés pour bâtir BedZED provenaient d’au plus 50 kilomètres du complexe. L’initiative a permis de réduire les émissions de gaz à effets de serre, contrecoup inévitable de la construction résidentielle. BioRegional soutient que l’attention portée au choix des matériaux a diminué de 25% l’impact du lotissement sur l’environnement.

« Ce projet n’est pas parfait, mais je crois que c’est un succès, lance Bill Dunster, en contemplant les maquettes de ses nouveaux projets, des émules de BedZED notamment pour la Chine. Ça nous prouve que lorsqu’on réunit les bons éléments ensemble, les idées peuvent se concrétiser. »

Quand la communauté s’y met

En 2002, le promoteur Peabody a vendu les plus grands appartements de BedZED un peu plus de 400 000$. Un excellent prix pour le marché londonien. Les propriétaires de ces appartements sur deux étages profitent d’environ 1000 pieds carrés, de trois chambres et d’une grande terrasse. Le promoteur a fixé à environ 1800$ par mois la location d’un appartement un peu plus petit comptant deux chambres. À ce prix, il faut faire vite. Quelques locataires profitent d’un programme de loyer à prix modique, et la liste d’attente est longue. Les résidents de BedZED sont donc pour la plupart des professionnels qui peuvent se payer un toit à une vingtaine de minutes des pôles économiques et culturels de Londres.

« Au départ, c’est la proximité du train et le design du projet qui m’ont plu, se souvient Steve Tabard, propriétaire depuis 2002. Ma femme est beaucoup plus écologiste que moi. Elle a plutôt craqué pour le côté vert du projet. »

Les résidents de BedZED sont pour la plupart à l’image de M. Tabard. Sensibles à la question environnementale, mais pas au point de participer à des manifestations ou d’abandonner l’automobile. Par contre, depuis qu’ils ont aménagé dans le complexe, ils mangent des produits bios cultivés localement, ils font leur compost et recyclent de façon plus systématique. Un groupe a même instauré un service de covoiturage.

« BioRegional a fait de la sensibilisation et ça fonctionne, explique Greg Searle, responsable du volet nord-américain de One Planet Living, organisme qui espère importer l’idée de BedZED au Canada). Il faudrait quatre planètes pour supporter le rythme de consommation des Canadiens. À BedZED, c’est une seule planète. »

Steve Tabard salue toutefois le caractère volontaire de l’aventure BedZED: « Personne ne vient vider mes poubelles pour vérifier si je recycle. Il n’y a pas de contraintes, et pourtant, tout le monde participe. »

BedZED en chiffres

* 3 Le nombre de fois que l’air se renouvelle en 24heures dans un appartement de BedZED. Dans un logement conventionnel, c’est en moyenne 20 fois.
* 15% la proportion de matériaux recyclés qui entrent dans la composition de BedZED.
* 50% l’économie d’eau engendrée par la récupération des eaux de pluie, pour remplir les toilettes.
* 52% la proportion de matériaux provenant de moins de 50 km du lieu de construction.
* 57% la réduction de l’énergie nécessaire pour chauffer l’eau que consomment les résidants du lotissement.
* 82 le nombre d’habitations en copropriété et en location du complexe. Quinze sont à loyer modique.
* 88% la réduction des frais de chauffage en comparaison avec la moyenne britannique.
* 100 le nombre de personnes qui travaillent dans des locaux aménagés à BedZED.

bedZED5%20500x364.gifLe meilleur de la construction verte

En élaborant BedZED, l’architecte Bill Dunster a sélectionné les avancées technologiques les plus performantes sur le marché. Pas question d’essayer une méthode marginale: le professionnel n’a sélectionné que des techniques éprouvées pour bâtir le célèbre complexe. En voici quelques-unes :

* Le toit des appartements de BedZED sont tous recouverts par de la végétation. Cette initiative permet de retenir une partie de l’eau de pluie, qui autrement finirait dans les canalisations de la ville. Les toits verts permettent aussi aux appartements d’être plus frais l’été.
* Les murs d’une épaisseur de 30 centimètres, environ 10 centimètres de plus que la moyenne des habitations anglaises, permettent une meilleur rétention de la chaleur en hiver et de la fraîcheur en été.
* Les immenses conduits d’air colorés qui caractérisent BedZED sont en fait une composante du système de ventilation passif. Le vent entre à l’intérieur des appartements par ces énormes tunnels et pénètre dans les chambres et les salons. Cette entrée d’air pousse naturellement l’air humide des cuisines et des salles de bains à l’extérieur par d’autres conduits d’aération.
* Plus d’un millier de panneaux photovoltaïques ont été installés sur les murs exposés au sud. Cette technologie a toutefois ses limites. Les résidents de BedZED n’en tirent que 15% de l’énergie dont ils ont besoin.
* Les appartements sont divisés par des murs et des planchers de béton. Comme la matière est très dense, elle absorbe la chaleur du soleil pendant le jour et, tout naturellement, la relâche pendant la nuit quand la température baisse.
* Une centrale électrique fournit une partie de l’énergie dont les résidents de BedZED ont besoin. Elle fonctionne grâce à la combustion du bois émondé dans la région.
* Le stationnement les plus près du complexe est réservé aux voitures électriques. Aucun résidant n’en possède pour le moment, mais quelques employés profitent de ces espaces privilégiés.

Source texte Objectif Zéro Énergie.org. Dernière photo.

A lire aussi, ce pdf.
l’organisation Bio-Regional, un des partenaires du projet.
L’architecte de BedZED, Bill Dunster.
Le site de « Vivre avec une planète« .
Une brochure BedZED, un quartier écologique pilote éditée par le CERDD.

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5 Replies to “Bedzed, un quartier écologique pilote”

  1. ramses

    Belle réalisation, qui préfigure l’architecture du futur. Quand écologie rime avec économies, c’est le succès assuré. Bravo !

  2. grasser

    C’est impressionnant… Les bâtiments produisent autant d’énergie qu’ils en consomment, ils n’ont presque pas besoin de chauffage et sont éclairés naturellement. En plus, je trouve le style des bâtiments plutôt réussis. C’est à se demander pourquoi toutes les constructions neuves ne respectent pas un cahier des charges semblable…

  3. Softi

    Merci pour l’affichage de cet original écrit ! C’est très pertinent. J’apprécie de lire votre site web et je suis beaucoup à la quête d’actualités dans le même style.

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