La prison ruinée, Brigitte Brami

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Car le feu qui me brûle est celui qui m’éclaire

Etienne de la Boétie

Dernièrement, j’ai reçu un petit livre de 40 pages, « La prison ruinée » de Brigitte Brami paru chez Indigène Éditions dont le nom est désormais connu car c’est aussi l’éditeur de « Indignez-vous » de Stéphane Hessel -collection « Ceux qui marchent contre le vent ». – 3 € – Sortie : février 2011 et déjà vendu à plus de 4000 exemplaires uniquement par le bouche à oreille, un récit à découvrir.

L’auteur telle qu’elle se présente :

Électron libre, spontanée voire sauvage ; féministo-lesbienno-libertaire. Ne mange pas de foie gras, et suis très sensible à la cause animale. Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir a été l’électrochoc de ma vie. Depuis, je participe à des actions selon mes convictions personnelles.
J’ai publié aux Éditions Saint Germain-des-Prés, vers l’âge de 20 ans, un recueil de poésie intitulé La lune verte. J’ai animé une émission de radio au moment des premières radios libres.
Ensuite, je me suis surtout intéressée à l’oeuvre de Jean Genet : un DEA en arts du spectacle mention théâtre sur Jean Genet ; une thèse de doctorat en littérature et civilisation française sur Jean Genet ; et j’ai été l’assistante de la commissaire, lors d’une exposition sur Jean Genet et le monde arabe, organisée par l’ambassade de France au Maroc, qui s’est déroulée dans tout le Maghreb, au début des années 2000. J’ai différents projets de publication. Mais si je me prends souvent au tragique, je ne me prends, je l’espère que très rarement au sérieux.

L’histoire :

« Une fille se rend chez un psychiatre/psychanalyste pour aller mieux. Elle possède un casier judiciaire vierge, et selon la formule consacrée, elle est inconnue des services de police. Quinze ans plus tard, elle a tout perdu, y compris le sentiment d’une quelconque légitimité de vivre. Y compris et surtout la perception d’un monde habitable.

Entre temps, elle a connu la prison, la cavale, la séquestration, les agressions et subi toutes les humiliations, en effet : elle a été condamnée en appel, le 8 mars 2008, à quinze mois de prison dont huit fermes – avec inscription au fichier central des personnes recherchées – pour « appels téléphoniques malveillants réitérés » à son psychanalyste, suite, explique-t-elle, de la décision sans concertation de son praticien d’abandonner brutalement la cure après un travail entrepris sur elle-même et qui l’avait fragilisée.

L’histoire vécue par Brigitte, il semble que personne n’en ait encore véritablement parlée avec justesse, jusqu’à que ce petit livre soit la voix qu’on lui avait refusée et qui est offert à la conscience et à la réflexion de chacun, de tous. »

« La prison ruinée » aurait pu tout aussi bien s’intituler « Les femmes de Fleury-Mérogis » tant ce récit de captivité est aussi un hymne à leur beauté, à leur vaillance et à leurs défaillances. Avec une écriture limpide et un verbe puissant, Brigitte Brami nous fait pénétrer en un des endroits les plus inaccessibles au monde au cœur même de la prison où se côtoient tant de personnes différentes, de celle qui a assassiné puis découpé son mari à cette autre, ancienne conseillère municipale condamnée pour abus de biens sociaux, en passant par divers destins plus ou moins tragiques. Plus encore, l’auteur nous invite au centre de ses réflexions sur la solidarité, le lien social [Le contexte particulièrement dur fait apparaître contre toute attente l’humain en l’Homme], sur la liberté aussi que l’on trouve précisément là où l’on s’y attend le moins [être détenue peut paradoxalement libérer de la pression du monde extérieur]. Enfin, Brigitte Brami nous interroge sur la question de la nécessité de la prison et ce faisant, sur notre société en général, à propos de laquelle elle constate amèrement que depuis bien trop longtemps, l’Occident ne sait plus aimer ni détester.

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Couloir de la prison de Fleury-Mérogis

Les détenues se trouvent dans la situation paradoxale où elles sont davantage en mesure d’accéder à la liberté que la plupart de leurs semblables car elles connaissent ce qu’est la privation de cette dernière. La seule liberté possible résidant dans la capacité mentale à ne pas être assignée à la place que l’on vous a forcée à occuper. La solution ? Elle est toujours poétique.

« La prison ruinée », de Brigitte Brami. Indigène Éditions -collection « Ceux qui marchent contre le vent ». – 3 € –

Vous procurer le livre si indisponible temporairement sur les sites classiques

La prison ruinée sur Facebook

La poésie libératrice de Brigitte Sy – Les Mains libres, long métrage de Brigitte SY

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7 Replies to “La prison ruinée, Brigitte Brami”

  1. Anna Galore

    Voilà, je l’ai lu.

    Ce livre est extraordinaire. Il est profond, intelligent, fin, pas du tout sombre (au contraire) et il questionne car il est aux antipodes de tout ce qu’on peut croire ou supposer de la vie quotidienne dans le monde carcéral.

    Brigitte Brami en est la première consciente, sa perception n’est que la sienne, elle ne veut pas en faire une généralité. Mais pour elle, le séjour qu’elle a passé en prison a certainement été l’un des plus heureux de sa vie, tellement il a été en fait une libération et non un enfermement.

    La principale raison en est la fraternité (je devrais dire la sororité dans son cas, puisqu’il s’est agi d’un séjour dans une maison d’arrêt pour femmes, Fleury Mérogis) généreuse et omniprésente des autres détenues avec qui elle a vécu. Cette chaleur est directement liée au fait que ces femmes partagent un espace protégé de l’extérieur (je n’ose plus dire « un espace fermé » tellement il est au contraire ouvert).

    Brigitte Brami en a d’ailleurs l’amère confirmation lorsqu’elle retrouve certaines détenues avec lesquelles elle a eu une affection particulière après qu’elles aient été libérées (là encore, l’adjectif reflète l’inverse du ressenti de ces femmes) : elles sont (re)devenues égoïstes, dures, sans joie, plongées à nouveau dans la misère de leur quotidien.

    Cela m’a fait penser – toutes proportions gardées – à cette impression de chaude sympathie qu’on peut éprouver en croisant des gens sur un lieu de vacances et qui se révèlent ensuite, si par hasard on les recroise quelques mois plus tard, d’un ennui total une fois de retour à la vie « normale » (ou plutôt normée, comme le souligne justement Brigitte Brami).

    Je ne peux pas vous décrire aussi bien qu’elle le fait tout ce qu’elle a vécu de beau à Fleury. Je vais juste vous citer un court extrait du début de son livre :

    « Des filles, fraîchement arrivées, hurlent de joie en retrouvant, à l’occasion de leur promenade, des anciennes connaissances. « Wesh, wesh » est leurs premières paroles. Elles se jettent dans les bras ; des rires jaillissent, et les unes donnent des nouvelles des copines « restées à l’extérieur », tandis que les sourires agrandissent les visages respectifs des autres. Ces visages ouverts, sculptés par les marques de l’imbrication de la souffrance et de la jouissance, respirent toutes les audaces mais aussi tous les manques. Les corps occupent avec aisance la cour, ils s’en approprient l’espace.

    Sans leur demander la permission, les Africaines tressent des nattes aux filles aux cheveux longs. On se tutoie d’emblée et on se plie au rituel chaleureux de la bise sans se connaître. D’une cellule à l’autre, d’une fenêtre à l’autre, on se parle. De la musique s’échappe des divisions et envahit la cour.

    Une franche camaraderie se renforce ainsi jour après jour. Des clans se forment par affinités électives. L’entraide est immédiate : les anciennes accueillent les arrivantes et leur expliquent le fonctionnement de la structure. Les plus endurcies protègent les nouvelles et les moins aguerries. »

    Lisez ce livre, il ouvre des portes là où on croit qu’elles sont fermées.

  2. anti

    Lu ailleurs :

    Brigitte Brami [sur l’article du blog et ses commentaires ] : « Ce lien qui libère est le plus beau et le plus juste depuis très très longtemps… Un grand merci et un grand bravo à sa créatrice ! »

    anti, de rien.

  3. brigittebrami

    Bonjour,
    La Prison ruinée va être désormais très difficile à se procurer dans ses lieux de vente habituels; y compris en ligne.
    Il est ainsi fort probable qu’on vous invoque : une rupture de stock chez l’éditeur, ou selon la formule consacrée : indisponible temporairement chez l’éditeur
    La Prison ruinée contre toute attente a été bien vendue, très bien vendue : à 4111 exemplaires en un peu plus de quatre mois, et cela UNIQUEMENT grâce au bouche oreille, c’est-à-dire grâce à VOTRE bouche et à VOS oreilles. Je tiens à vous en remercier ici chaleureusement vous toutes et tous.
    L’aventure ne s’arrête pas là : Si vous désirez vous procurer un ou plusieurs exemplaires de La Prison ruinée, vous pouvez adresser un chèque (à mon nom) de quatre euros et 50 C. (4E50) pour chaque exemplaire, frais de port compris ( pour la France )à l’adresse suivante :
    Brigitte Brami
    1, rue Vidal de la Blache
    75020 PARIS
    Ne vous inquiétez pas c’est une adresse administrative et non domiciliaire !
    Je compte sur vous pour poster, envoyer aux sites, blogs, listes de contacts, presse, etc., cet événement.
    Merci d’avance,
    Brigitte BRAMI
    brigittebrami@yahoo.fr
    Tél. 06 49 35 99 78
    TROIS LIENS QUI LIBÈRENT… :
    http://www.annagaloreleblog.com/archive/2011/07/18/la-prison-ruinee-brigitte-brami.html
    http://www.facebook.com/laprisonruinee#!/pages/LA-PRISON-RUINEE/214043171941570
    http://www.facebook.com/laprisonruinee#!/event.php?eid=133423576743834

  4. Anna Galore

    Merci pour ces informations, Brigitte. Il sera utile d’en reparler ici et ailleurs à partir du mois de septembre, en ce moment la plupart des gens sont en vacances (nous le voyons sur notre blog, où nous avons en cette période de l’année deux fois moins de visiteurs que d’habitude).

    Votre livre est magnifique, nous espérons qu’il poursuivra sa route pour trouver encore plus de lectrices et de lecteurs. Le bouche à oreille, comme vous le faites justement remarquer, est souvent la meilleure des promotions. Bon courage à vous pour la suite !

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