Eyeh asher eyeh

« Eyeh asher eyeh » est l’une des phrases de l’Ancien Testament (Exode, 3,14), qui a fait le plus couler d’encre malgré sa simplicité apparente.

Lors de l’exode, Moïse rencontre Dieu et lui demande qui il est.
Dieu lui répond « Eyeh asher eyeh » ce qui, traduit littéralement, veut dire « Je suis ce que je suis ».

D’autres traductions ont été proposées:

– « Je suis qui je suis », ce qui est une tautologie « moi c’est moi » (et réciproquement 😉

– « Je suis celui qui est » (beaucoup plus profond, « je suis l’incréé, l’existant absolu »)

– « Je suis celui que je deviendrai » ce qui est plus ambigu puisqu’on peut l’interpréter par « je suis une forme parfaite de toute éternité » ou, au contraire, « ma vraie nature est celle vers laquelle j’évoluerai » ce qui voudrait dire que Dieu n’est pas parfait… mais qui s’appliquerait par contre bien à n’importe quel être humain.

Nietzsche a d’ailleurs brillamment ajouté : « Deviens qui tu es », lançant ainsi la grande vague du développement personnel et son cortège de dizaines de milliers de coaches, gurus autoproclamés et autres consultants plus ou moins efficaces pour aider à atteindre ce but par ailleurs tout à fait respectable: découvrir qui on est vraiment pour pouvoir être soi-même.

Et comme disait Michel Audiard il me semble:
– Tu te prends pour Dieu?
– Il faut bien prendre exemple sur quelqu’un.

10 Replies to “Eyeh asher eyeh”

  1. anti Post author

    Plus c’est simple, plus c’est simple.

    anti, simple comme bonjour.

    C’est marrant (mais, pourquoi j’écris tout le temps ça moi ? Ben, paske), donc, oui, c’est marrant, je pense à plein de choses en même temps suite à cette note et là, je pense à ce fameux test tout simple et pourtant… Le « Qui suis-je ? » (1954) qui consiste à répondre 20 fois de suite à la question qui suis-je ?

    C’est très intéressant pour prendre du recul…

    « découvrir qui on est vraiment pour pouvoir être soi-même. »

    Etre soi-même pour enfin découvrir qui on est pour pouvoir découvrir…

    La Fleur qui donne le fruit qui donne l’arbre qui donne la fleur.

    Incroyable sensation très claire des cycles de Vie.

    anti, Eyeh asher eyeh

  2. Anna Galore Post author

    Sur le fait que la façon la plus courante de nommer Dieu dans la conversation est HaChem (Le Nom), juste une remarque: en hébreu « écoute » (impératif du verbe écouter) se dit Chema. Ce lien entre Chem (le nom) et Chema (écoute) me fascine. Il semble dire que le Nom est avant tout quelque chose qui se dit avant d’être quelque chose qui s’écrit.

    Anna, l’ivre des Noms

  3. anti Post author

    « Il semble dire que le Nom est avant tout quelque chose qui se dit avant d’être quelque chose qui s’écrit. »

    Ah ben bien sûr ! La tradition est avant tout orale. L’écriture est intervenue tellement tard !

    Ce qui me fascine plus dans ce que tu viens de dire, c’est que pour ma part, il me semble que le Nom préside à l’existence même des choses et des êtres. On nomme et paf ! La lumière est.

    anti, TTB.

  4. Anna Galore Post author

    Oui, c’est ce qu’on retrouve dans la vraie version originale de la Genèse: « Au commencement était le Verbe ». J’ai développé ce thème dans « La crypte au palimpseste », autour de cette phrase « Les mots sont l’Univers ». C’est la base de la Kabbale.

    Pour revenir à Chema, la prière la plus connue de l’Ancien testament se nomme « Chema Israël ». La voici:

    Chema Israël, Adonaï elohénou, Adonaï ehad
    Veahavta ett Adonaï Elohekha, bekhol levavekha,
    ou bekhol nafchekha ou bekhol meodekha

    Pour les rares personnes parmi vous qui ne parlent pas hébreu, en voici la traduction:

    Ecoute Israël, l’Eternel notre Dieu, l’Eternel est Un
    Tu aimeras l’Éternel ton Dieu, de tout ton cœur,
    de toute ton âme et de tous tes moyens.

  5. anti Post author

    C’est curieux ce que je viens de voir à l’instant… Je viens de lire « Au commencement était le Verbe », mais j’ai lu le dernier mot à l’envers, vu de haut, et j’ai lu epreV, épreuve.

    anti, Nom de Dieu !

  6. Jean-Marc Post author

    La traduction littérale de cette phrase est « je serai celui que je serai » ou encore « je serai ce que je sera ». L’ambiguïté de sens réside dans le « asher », mais une chose est certaine : ce ne peut être traduit par un temps présent, car il s’agit d’un futur. C’est « Je serai » et non pas « Je suis ».

    Pour comprendre le sens de ce « je serai », il importe de le replacer dans son contexte, celui de cet échange (ou plutôt de cette négociation) entre Moïse et l’Eternel. Le Très Haut cherche à convaincre Moïse qu’il doit sortir ses frères hébreux d’Egypte où ils sont tenus en esclavage. Mais voilà. Tout Eternel qu’il est, Moïse lui résiste bec et ongles. Il feinte, ruse avec le Très Haut. Après lui avoir demandé « qui il etait pour se voir confiée pareille mission », il demande : « mais à supposer que j’accepte cette mission, les Hébreux vont me demander qui m’envoie. Que devrai-je leur dire ? »

    C’est là que Dieu répond : « eyeh asher eyeh ». Une interprétation possible est donc : « je serai celui qui accompagnera mon peuple et ce jusqu’à la fin des temps ».

  7. Philippe Labé

    La veritable traduction de cette profonde et étrange expression est,:
    « Je suis le Je suis ». Il ne faut pas trop « s’embourber » sur le terrain des conjugaisons de temps. C’est bien de l’Ipséité divine qu’il s’agit. L’énigme réside plutôt sur la portée du message divin que Moïse doit communiquer à son peuple. C’est curieusement une réponse très métaphysique que le Très Haut adresse à son auguste messager:
    Comment un peuple de nomades et de bergers, en esclavage en Égypte, peut-il saisir la profondeur d’une telle révélation sur l’Identité Divine??

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